Responsabilité du fait des produits défectueux Cass. civ. 1ère, 20 septembre 2017

CEMCAP - Compagnie des Experts Médecins près la cour d'appel de Paris - Responsabilité du fait des produits défectueux Cass. civ. 1ère, 20 septembre 2017

Responsabilité du fait des produits défectueux Cass. civ. 1ère, 20 septembre 2017

Responsabilité du fait des produits défectueux – Conditions d’exonération de responsabilité du producteur.

La Cour juge que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment de la mise en circulation des produits administrés à la victime entre 2006 et 2009, permettait de déceler l’existence du défaut du Mediator, et par conséquent, que la société n’était pas fondée à invoquer une exonération de responsabilité au titre du dommage subi par la victime.

 

Dans cette affaire, une patiente à laquelle a été prescrit du Mediator entre le 9 février 2006 et le 17 octobre 2009 pour remédier à une tryglicéridémie a présenté une insuffisance aortique. Après avoir sollicité une expertise judiciaire, elle a assigné la société Les Laboratoires Servier, producteur du Mediator, en réparation du préjudice subi. La Cour de cassation était saisie d’un pourvoi, formé par les Laboratoires Servier, à l’encontre de l’arrêt de cour d’appel jugeant notamment que l’insuffisance aortique de l’intéressée était imputable au Médiator.
La Cour de cassation confirme tout d’abord l’arrêt de cour d’appel qui a jugé qu’il existait des présomptions graves, précises et concordantes permettant de retenir que sa pathologie est imputable au Mediator en se fondant sur l’avis du collège d’experts, placé auprès de l’ONIAM sur les dommages et les responsabilités en vue d’une indemnisation amiable des victimes du benfluorex en faveur d’une imputabilité de l’insuffisance aortique à la prise de Mediator et en relevant par ailleurs que la connaissance sur les effets nocifs du médicament avait progressé, qu’aucune hypothèse faisant appel à une cause étrangère n’avait été formulée et qu’aucun élément ne permettait de considérer que la pathologie de l’intéressée était antérieure au traitement par le Mediator.
La Cour de cassation écarte ensuite le moyen présenté par Les laboratoires Servier, tiré de ce que les juges d’appel ont écarté à tort l’exonération de responsabilité qu’elle avait invoquée sur le fondement du 4° de l’article 1386-11, devenu 1245-10 du code civil. La Cour de cassation rappelle que le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par le défaut de son produit à moins qu’il ne prouve, selon le 4° de l’article 1386-11, devenu 1245-10 du code civil, que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler l’existence du défaut et que la date de mise en circulation du produit qui a causé le dommage s’entend, dans le cas de produits fabriqués en série, de la date de commercialisation du lot dont il faisait partie.
Après avoir retenu le caractère défectueux du Mediator, la cour d’appel avait décrit les diverses conditions dans lesquelles avaient été révélés les effets nocifs de ce produit ce qui aurait dû conduire la société à procéder à des investigations sur la réalité du risque signalé, et, à tout le moins, à en informer les médecins et les patients. La Cour de cassation juge que la cour d’appel, qui a ce faisant estimé que l’état des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise en circulation des produits administrés à l’intéressée entre 2006 et 2009 permettait de déceler l’existence du défaut du Mediator, en a exactement déduit que la société n’était pas fondée à invoquer une exonération de responsabilité au titre du dommage subi par la victime.

 

Article 1245-10 du code civil : « Le producteur est responsable de plein droit à moins qu’il ne prouve : 1° Qu’il n’avait pas mis le produit en circulation ; 2° Que, compte tenu des circonstances, il y a lieu d’estimer que le défaut ayant causé le dommage n’existait pas au moment où le produit a été mis en circulation par lui ou que ce défaut est né postérieurement ; 3° Que le produit n’a pas été destiné à la vente ou à toute autre forme de distribution ; 4° Que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler l’existence du défaut ; 5° Ou que le défaut est dû à la conformité du produit avec des règles impératives d’ordre législatif ou réglementaire. Le producteur de la partie composante n’est pas non plus responsable s’il établit que le défaut est imputable à la conception du produit dans lequel cette partie a été incorporée ou aux instructions données par le producteur de ce produit.

Cass. civ. 1ère, 20 septembre 2017, n° 16-19.643 (publié)